I. Introducción

Le Faust de Goethe est le livre le plus important de la littérature allemande. Il joue le même rôle pour les Allemands que Don Quichotte pour les Espagnols, la Divine Comédie pour les Italiens ou Hamlet pour les Anglais. (Il semble que le cas du francais est un peu différent. En ce qui concerne le francais il n'y a pas un œuvre ou auteur dominant. Molière, Racine, Voltaire, Zola, Hugo, etc. etc. sont tous très imporant, mais aucun auteur est dominant.)


Il est enseignée dans toutes les écoles et fait partie de ce qu'on appelle la "culture générale". Cependant, il ne faut pas croire que tous les Allemands connaissent cette pièce et, surtout, il ne faut pas croire que tous les Allemands sont fascinés par cette pièce. Il est bien connu que tout ce qui fait partie de la culture générale court le risque de perdre son authenticité : les professeurs des écoles l'enseignent parce qu'ils sont payés pour l'enseigner ; les élèves le lisent parce qu'ils doivent le lire ; certaines personnes le lisent parce que, de temps en temps, cela fait bonne impression de pouvoir le citer ; les professeurs des universités écrivent des livres sur Faust parce que de nombreux livres ont déjà été écrits sur le sujet et qu'un de plus ne fait du mal à personne, surtout s'ils sont payés pour le faire. Ces raisons de lire Faust sont un peu arbitraires et n'ont rien à voir avec Faust lui-même, car ces personnes liraient n'importe quoi d'autre, si elles étaient payées ou si quelque chose d'autre devenait à la mode. Dans ce cas, Faust a une valeur non pas pour lui-même, mais pour ce qu'il représente dans la société pour des raisons historiques. En d'autres termes, ce type d'estime est à la fois superficiel et ennuyeux.

Ce qui est vraiment intéressant dans ce processus, c'est le fait qu'une œuvre qui critique si massivement la routine académique, comme nous le verrons plus tard, a pu devenir une partie de cette routine académique elle-même.

L'auteur de ce chapitre ne croit pas beaucoup à ce qu'on appelle la "culture générale". Pour l'auteur, une personne généreuse et responsable a la culture. Dans les années 1933 à 1945, il y avait beaucoup de personnes "cultivées" qui, ensemble, ont rendu possible la catastrophe ultime ; en d'autres termes, la "culture générale" est compatible avec la barbarie totale et est donc inutile.

L'enseignement de Faust dans les écoles a peu de succès. En général, les gens ne voient aucun lien entre leur propre situation et les problèmes de ce type. Goethe lui-même est une arme assez forte pour se défendre contre une culture générale qui ne vit pas, contre une culture qui se transmet d'une génération à l'autre simplement parce qu'elle est bien établie dans l'esprit des fonctionnaires sans que personne n'ait réfléchi à sa pertinence. Ces personnes devraient se rappeler ce que Goethe lui-même a dit à ce sujet :


Was morsch ist, soll brechen. Ce qui est pourri doit se briser.

La réception d'une œuvre littéraire dépend de beaucoup de choses : des expériences personelles du lecteur, de sa sensibilité, des circonstances dans lesquelles on vit au moment de lire cette œuvre. Faust nous montre un certain nombre de personnes. Il nous montre des universitaires qui lisent des livres comme d'autres collectionnent des timbres, il nous montre des gens qui ont si peu d'expériences personnelles qu'ils passent leur temps à se réjouir du malheur des autres, il nous montre Hollywood avant que Hollywood n'apparaisse, il nous montre l'hypocrisie dans de multiples versions, et, surtout, il nous montre un homme, Faust, assez lucide pour voir le ridicule de tous ces gens. Pour l'auteur de ce chapitre, Faust est une œuvre très actuelle, tellement actuelle que dans certaines circonstances elle peut devenir une arme. Si, par exemple, vous dites ces phrases de Faust à un professeur car je l'ai essayé.

FAUST FAUSTE

Such Er den redlichen Gewinn!
Sei Er kein schellenlauter Tor!
Es trägt Verstand und rechter Sinn
Mit wenig Kunst sich selber vor!
Und wenn's euch Ernst ist, was zu sagen,
Ist's nötig, Worten nachzujagen?
Ja, eure Reden, die so blinkend sind,
In denen ihr der Menschheit Schnitzel kräuselt,
Sind unerquicklich wie der Nebelwind,
Der herbstlich durch die dürren Blätter säuselt!

Cherchez donc un succès honnête,
et ne soyez pas des fous secouant leurs grelots.
La raison et le bon sens
n’ont pas besoin de tant d’art pour se produire ;
et si vous avez quelque chose de sérieux à dire,
quelle nécessité de faire la chasse aux mots ?
Oui, vos discours si brillants,
où vous ajustez à plaisir des rognures pour l’humanité,
sont stériles comme les vents brumeux
qui sifflent dans l’automne à travers les feuilles séchées.


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